Le modèle « APV », une figure méconnue de l’autoconstruction à Lima. Enquête dans le quartier San Hilarion (district de San Juan de Lurigancho)
Cette thèse analyse les fonctions sociales et économiques des logements issus de l’auto-construction dans les quartiers populaires de Lima, à partir d’une enquête de terrain réalisée au sein de l’Asociación pour le logement (APV) San Hilarión, située dans le district de San Juan de Lurigancho. Elle s’attache à comprendre comment la production collective et familiale d’immeubles auto-construits donne lieu à des usages différenciés – résidentiels, économiques et patrimoniaux -, et comment ces usages structurent les rapports entre générations, entre propriétaires et hébergés, et entre propriétaires et locataires. Au coeur de cette recherche se trouve l’analyse de la quête d’une rente à travers l’exploitation du bien immobilier familial, ainsi que les tensions et les arrangements sociaux que cela implique.
Le premier chapitre examine la spécificité des APV à travers les cadres juridiques et politiques ayant présidé à leur création, dans le contexte de la réforme agraire et de la réforme foncière de 1969. En retraçant l’émergence de ces associations et la genèse de l’APV San Hilarión, il interroge les formes d’intervention étatique face à l’auto-construction.
Le deuxième chapitre s’intéresse aux discours de la première génération d’habitants, propriétaires et initiateurs de l’auto-construction sur cette expérience, éclairant les rapports de distinction que ses habitants entretiennent vis-à-vis des barriadas. Il explore la manière dont ils valorisent leur parcours résidentiel, leur relation à la propriété et leurs représentations sur l’État dans le processus de consolidation urbaine.
Le troisième chapitre analyse les effets matériels d’un demi-siècle d’auto-construction à l’échelle de l’immeuble dans ce quartier. Il met en lumière les dynamiques de densification, les usages résidentiels différenciés, et les stratégies déployées pour adapter les immeubles à la fois aux besoins domestiques et à la génération de revenus locatifs.
Enfin, le quatrième chapitre explore les arrangements familiaux autour de la cohabitation, de la location et de la transmission de l’immeuble, et met en évidence les obstacles à la formalisation des droits de propriété. Il montre comment la quête de rente transforme les relations sociales au sein des immeubles, en suscitant des négociations intergénérationnelles et des tensions entre valeur d’usage et valeur patrimoniale du bien.
Mots-clés : Auto-construction, transmission du patrimoine, rente locative, relations sociales, géographie urbaine, Lima, associations pour le logement (APV)