soutenance de thèse de Raphael GALLIEN

\n\n\n\n\n

Délirer la situation coloniale. Une histoire sociale et politique de la folie sur les Hautes Terres de Madagascar (1863-années 1950)

À partir de l’étude des dossiers d’internement de l’hôpital d’Anjanamasina – plus de 1480, qui constituent le corpus principal, auxquels s’ajoutent archives administratives, religieuses, et littérature médicale -, cette thèse installe le délire en son centre, comme un prisme révélateur du quotidien colonial à Madagascar durant la première moitié du XXe siècle. Le délire est analysé selon une approche multiscalaire, à partir d’une lecture microhistorique qui n’exclut pas l’échelle globale, afin d’interroger l’articulation qui s’opère entre subjectivités, quotidiens coloniaux et recompositions politiques. Plutôt que de le considérer comme une expérience uniquement personnelle ou de le réduire à une histoire de la médecine et de ses catégories, l’objectif est de tirer parti de sa puissance expressive pour offrir une étude originale de la société malgache. Une grande attention est donc portée aux motifs, noms, dates, évènements convoqués par le délire, constituant autant de « résurgences » qui nous renseignent sur l’articulation des mouvements de l’histoire au fondement des subjectivités. En examinant comment le trouble se construit et les réponses institutionnelles qui l’accompagnent, il s’agit d’explorer les dynamiques du pouvoir, les circulations de normes et de savoirs, ainsi que la manière dont les individus mobilisent les institutions, l’espace et l’imaginaire pour se réapproprier les frontières du monde social. À terme, là où le symptôme peut être vu comme une tentative de résolution pour le sujet, l’acte de création qu’il implique soulève des questions sur la construction sociale de l’individu au sein de la « situation coloniale », dans ses sédimentations psychiques les plus profondes.

Mots-clés : Colonisation, corps, délire, folie, histoire, Madagascar, psychiatrie, santé, social, sensibilité