soutenance de thèse de Vincent DUBOIS

Prédiction de sinistralité dans le bâtiment : diminuer les risques de désordres par l’exploitation de données de sinistralité agrégées avec des données caractérisant les bâtiments et leur environnement grâce à l’intelligence artificielle.

Face à l’augmentation des coûts des sinistres dans le bâtiment, cette recherche explore l’utilisation de l’intelligence artificielle pour prédire les désordres décennaux en construction neuve. L’objectif principal consiste à développer un prototype d’outil prédictif capable d’identifier les points de vigilance sur un ouvrage futur, en analysant les bâtiments sinistrés passés et leurs caractéristiques. La méthodologie s’appuie sur l’exploitation de la base de données issue du Système de collecte des désordres (Sycodés) de l’Agence Qualité Construction (AQC), recensant plus de 740 000 dommages pris en garantie dans le cadre de l’assurance Dommages ouvrage (DO) depuis 1995, avec des coûts de réparation situés entre 1 800 et 160 000 euros. Ces données ont été enrichies par agrégation avec plusieurs bases de données nationales, permettant la récolte d’informations complémentaires concernant les bâtiments et leur environnement (typo-morphologie, aspects constructifs, climat, risques naturels, etc.). L’étude se concentre sur le secteur résidentiel (individuel et collectif). Plusieurs modèles prédictifs en intelligence artificielle (IA) ont été développés selon trois niveaux de détail. Ces modèles estiment les probabilités d’occurrence de désordre sur différents éléments d’ouvrages en fonction des caractéristiques du bâtiment et de son environnement. Une double évaluation a été mise en place : d’une part, des métriques d’apprentissage automatique classiques et des analyses de calibration des probabilités, d’autre part, une évaluation impliquant directement les acteurs du bâtiment à travers l’intégration des modèles dans un prototype d’application de prévention. Les résultats démontrent que l’IA peut effectivement identifier des zones de vigilance durant les phases de conception et d’exécution, dans une certaine mesure. L’inclusion de données sur l’exécution des ouvrages (sous-traitance, durée du chantier, qualification des entreprises, etc.) dans le jeu de données d’entraînement, pourrait notamment améliorer les performances prédictives des modèles développés. Cette recherche ouvre plusieurs perspectives d’application dans le secteur du bâtiment : un outil d’aide à la conception pour la maîtrise d’oeuvre, un support de dialogue avec les assureurs, un dispositif de formation ou encore un système d’alerte sur les points de vigilance pour les entreprises. Cependant, l’étude confirme qu’en l’état actuel, cette technologie doit rester un outil d’aide à la décision qui ne peut pas se substituer à l’expertise humaine dans l’évaluation des risques en construction. Elle enrichit néanmoins le dialogue entre les acteurs du bâtiment autour de la prévention des sinistres et propose des perspectives prometteuses pour la prévention des désordres.

Mots-clés : Désordres du bâtiment, Sinistralité décennale, Prédiction de risques, Agrégation de données, Intelligence artificielle